Aeli

Ma honte, ma haine

 
Le soir, je me sens terriblement seule coupée de mes plus proches amis et je ne sais à qui me raccrocher. Mon voisin a remarqué ma fragilité grandissante. Lui qui me tourne autour depuis des semaines et que j'ai toujours rembarré, il saisie l'occasion. Il devient gentil, prévenant et attentionné à chaque fois que l'on se croise et, si je résiste un temps, ayant pleinement conscience que les rumeurs en fond « l'homme à esquiver d'urgence », je finis par lui céder. J'entame avec lui une liaison destructrice sous le regard affolé de ma mère. Alcoolique, tous les weekends se finissent bourrés. Il arrive par la manipulation à me mettre totalement sous son emprise. Il profite de ma piètre opinion de moi pour me rabaisser un peu plus, que je me sous estime totalement, que je culpabilise de tout et que je mérite rien de bien. J'étais une écorchée, me voilà démolie. Le peu de force qu'il me reste, je le donne à mes élèves. Puis une de ses maîtresses prend une place plus importante dans sa vie. Aussi malsaine que lui, ils se mettent à deux à me tourmenter. Je n'ai plus aucune volonté, aucune fierté. Je subissais tout jusqu'ici mais malgré tout là j'atteins mes limites et je trouve le courage de prendre mes distances. Il ne le supporte pas, il veut garder sa chose. Il entreprend donc tout pour me récupérer, me dit qu'il a rompu avec l'autre, qu'il n'y a plus que moi. Je résiste tant bien que mal, acceptant juste un rapport cordial dans le but de ne pas rendre l'immeuble témoin d'une guérilla.

Il m'appelle un soir, il veut discuter. Après quelques verres où effectivement nous discutons « amicalement » il se montre grossier, recommence son manège. Bien que je continue de me refuser à lui, il insiste...et finit par me sauter dessus. J'ai beau le supplier d'arrêter, il me prend moi et le peu d'estime qui me restait. Bien que plus forte que lui physiquement, je reste pourtant tétanisée, aussi fragile qu'une enfant. Il n'écoute pas mes suppliques, me perce le corps et l'âme et je ne peux que subir en pleurant, incapable de réagir. J'ai l'impression que cela dure une éternité. J'essais de me déconnecter de mon corps, de me concentrer sur autre chose. Un film est diffusé sur l'écran, « le vélo de Ghislain Lambert » mais ce soir le belge ne me fait pas rire...
Lorsqu'enfin il s'arrête, il agit comme si tout était normal, satisfait d'avoir repris la main sur son jouet. Je remonte chez moi dans un état second. Je me sens sale, monstrueuse, j'ai honte. L'eau brulante du bain et le gain de crin qui rougissent ma peau n'efface rien. C'est en moi, il a gravé son empreinte au plus profond de mon être.

Je m'en veux tellement. Pourquoi me suis-je laissez faire ? Pourquoi je ne me suis pas davantage débattue ? Je suis restée plantée là comme une poupée de chiffon. Lui ai-je vraiment dis non ? Oui, au moins une centaine de fois. La belle affaire puisque j'ai été incapable de bouger !

Je me couche au bord de l'implosion. Peut-on appeler cela un viol alors qu'il y a peu nous sortions encore ensemble et que je ne me suis pas assez défendue ? Personne ne me croirait de toute façon. J'étouffe ce cri de douleur qui ne demande qu'à sortir et je m'endors enfin le cœur meurtrie de honte avec mon lourd secret.

 




09/03/2012
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